Nous avons eu la chance de pouvoir poser nos questions à Amélie Harrault, réalisatrice de L'Armée des Romantiques. Cette série de 4 épisodes, diffusée en décembre 2024 sur Arte, pose un regard original sur une période foisonnante de la création artistique en France. Retour sur son processus de création.

Comment vous est venue l’envie de raconter ces histoires ?
La série L’Armée des Romantiques (1827-1874) est née d’un désir de mettre en lumière une période de notre histoire souvent méconnue. Elle raconte cette époque à travers le regard des plus grands artistes du XIXe siècle français, qui ont révolutionné l’histoire de l’art et des idées. Victor Hugo, George Sand, Alexandre Dumas, Eugène Delacroix, Hector Berlioz, Charles Baudelaire… tous ces noms nous sont familiers, mais qui étaient-ils vraiment ? Avant d’apparaître dans les livres d’histoire, ils étaient jeunes, rebelles, pleins d’idéaux. À travers leurs vies, leurs œuvres, leurs amitiés, leurs combats et leurs rivalités, nous souhaitions mettre en lumière un siècle bouillonnant, qui a été le prélude à notre société moderne.
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Hugo, Dumas, Sand, Balzac, Delacroix, Berlioz, de Nerval et Gautier © Silex Films – Arte
Comment est-ce qu’on monte un projet comme celui de “l'Armée des Romantiques” ? Combien de temps avant de pouvoir passer à l’animation ?
L’Armée des Romantiques est une série chorale qui allie une exigence d’écriture, mêlant vérité historique et codes de la fiction, à une richesse d’animation proposant des ruptures graphiques. Pour cette création originale entièrement en animation, l’écriture a nécessité six années de travail, incluant la conception du scénario, la voix-off, la mise en scène et le story-board. J’ai mené ce travail en étroite collaboration avec mes co-scénaristes, Valérie Loiseleux puis Céline Ronté.
Nous avons d’abord entamé, avec Valérie Loiseleux, une véritable enquête : interroger, confronter, recouper témoignages, écrits, biographies, iconographies, articles et journaux afin d’assurer la véracité historique de la série. Une fois cette base documentaire solide établie, nous avons pu affiner le scénario avec Céline Ronté, en utilisant les codes de la fiction — arche narrative, dramaturgie, incarnation, cliffhangers — pour donner vie à l’histoire.
Le story-board s’est construit en parallèle, dans un dialogue constant, afin d’adapter l’écriture aux contraintes liées à l’économie d’une série d’animation. Au bout de cinq ans, nous avons lancé la fabrication de la série, qui a duré deux ans, tout en poursuivant le travail d’écriture jusqu’aux enregistrements de la voix-off.
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Quel a été votre processus de développement esthétique ? Quelles ont été les phases de conception du charadesign, des décors, etc ?
L’objectif était de réaliser une série d’animation mêlant documentaire et fiction, en combinant harmonieusement iconographie d’époque et créations originales. Dès le début du processus créatif, j’ai consulté des milliers d’images (peintures, dessins, gravures, sculptures, photographies…) afin d’identifier les bases sur lesquelles je pourrais m’appuyer pour développer l’esthétique de la série. Je souhaitais également conserver un rendu pictural qui me donnerait la liberté d’adapter l’aspect esthétique en fonction de mes envies d’écriture, en utilisant différentes techniques telles que la peinture à l’huile, l’aquarelle, la gravure, le fusain ou l’encre de Chine. J’ai d’abord mené une phase de recherches visuelles et techniques lors du développement du pilote. C’est à cette étape que j’ai décidé d’utiliser le logiciel Rebelle pour la fabrication des décors, ainsi que TVPaint pour l’animation.
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Le baiser © Silex Films - Arte France | Léopoldine, fille de Victor Hugo © Silex Films – Arte France |
Quel a été le processus d’animation ? À quelles étapes avez-vous utilisé TVPaint ?
Sur Mademoiselle Kiki et les Montparnos ou Les Aventuriers de l'Art Moderne, j’utilisais encore beaucoup d’animation traditionnelle sur papier, de peinture sur verre et de papier découpé sous banc-titre. Pour cette nouvelle série, il était nécessaire de repenser ma méthode afin de simplifier et d’optimiser la fabrication. TVPaint Animation s’est rapidement imposé comme une évidence, car il permettait d’obtenir différents types de rendus :
« peinture animée », « animation traditionnelle » ou « à la plume » par exemple. Cela m’a permis de conserver une sensibilité graphique et artistique, tout en restant cohérente avec l’esthétique de l’époque et le sujet de la série : la création artistique.
Nous avons utilisé TVPaint pour le posing, l’animation, la mise en couleur automatique, ainsi que pour la dernière étape de colorisation plus plastique, afin d’apporter du modelé et de la matière, notamment une touche d’aquarelle sur les personnages.
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Y a-t-il une fonctionnalité de TVPaint en particulier qui vous a été utile sur ce projet ?
Oui, la mise en couleur automatique (Calque CTG), réalisée au studio Les Astronautes à Valence, nous a permis de gagner un temps précieux sur cette étape du travail.
Quelle est votre partie préférée de la série ?
C’est difficile à dire, mais j’aime beaucoup les passages avec des ruptures graphiques, comme la séquence de la Symphonie Fantastique dans l’épisode 1, le portrait de Baudelaire dans l’épisode 2, ou encore Ratapoil dans l’épisode 3…
Où le public peut-il regarder “l'Armée des Romantiques” ?
Il peut regarder la série sur arte.tv.
D’autres projets pour la suite ? Sur TVPaint peut-être ?
Je suis encore en pleine réflexion mais ce sera probablement un projet réalisé sur TVPaint !